A Diffa, 288.576 enfants ciblés et vaccinés contre la polio, 248.000 ont bénéficié de la vitamine A et 286.000 de l’Albendazole
Dans cette région, qui fait face à un défi sécuritaire, 288.576 enfants sont ciblés pour être vaccinés contre la polio, 248.000 autres ciblés pour l’absorption de la vitamine A et 286.000 pour l’Albendazole. Selon le Directeur régional adjoint de la Santé publique de Diffa, M. Mamadou Elhadj Ibrahim, à la date du 16 juin, « tous ces enfants cibles seront atteints, notamment avec les deux jours supplémentaires (17 et 18 juin 2019), consacrés à un vaste ratissage et cela malgré l’afflux des réfugiés du Nigéria dans la zone», a-t-il rassuré. «À Diffa nous avons l’habitude d’atteindre toutes nos cibles et même de les dépasser en prenant en compte les enfants des déplacés et des réfugiés. Donc, depuis plusieurs années, à Diffa, nous avons toujours vacciné plus que les cibles », a ajouté M. Ibrahim. Selon le Directeur régional adjoint de la Santé publique, des dispositions sécuritaires ont été prises par les autorités administratives et sécuritaires même au niveau des frontières, pour procéder à des vaccinations des enfants dans les zones frontalières Maïné-Soroa-Nigéria ; Goudoumaria-Nigéria, qui sont des zones très sensibles. « Des équipes s’y sont rendues et ont vacciné les enfants, nous avons les documents et les rapports des vaccinateurs. Il faut aussi noter l’appui des autorités coutumières qui nous ont aidé dans cette tâche» a-t-il reconnu. Et Mamadou Elhadj Ibrahim d’ajouter : «chaque enfant a le droit de recevoir deux gouttes de vaccin antipoliomyélitique durant cette campagne. De la vitamine A et de l’Albendaloze seront donnés à l’enfant selon son âge. La vitamine A, joue un rôle important dans la réduction de la morbidité et la mortalité infantile et l’Albendazole est indispensable pour protéger l’enfant contre les vers intestinaux qui sont responsables des parasitoses. Durant plusieurs jours, les vaccinateurs et vaccinatrices munis de leurs thermos ont fait le porte à porte, à pied, la seule stratégie efficace pour atteindre tous les enfants cibles. Dans la commune de Diffa, c’est une vingtaine de quartiers qui ont reçu les équipes de vaccinateurs, durant les 6 jours qu’a duré la campagne. Au niveau de la région, les communes urbaines de Maïné-Soroa et de N’Guigmi, ont aussi été visitées par les équipes de vaccinateurs. A cela s’ajoutent les communes rurales de Bosso, Chétimari, Gueskérou, Toumour, Foulatari, Goudoumaria, N’Guelbety, Kabelawa et N’Gourti. A Diffa comme ailleurs, la réussite de toutes ces campagnes de riposte et de prévention ont sollicité une forte mobilisation des différents acteurs dont : des gouverneurs, des préfets, des maires, des chefs coutumiers, des chefs de groupements nomades, des leaders religieux, des volontaires (vaccinateurs, relais communautaires), des regroupements et associations, des célébrités locales (musiciens, lutteurs, artistes, etc) tous ont contribuer d’une fàon ou d’une autre aux côtés des médecins et infirmiers pour la vaccination complète des enfants de 0 à 5 ans dans les région concernées. Tous ces divers acteurs, ont donné de leur disponibilité car étant convaincus que la riposte à une épidémie de cette maladie invalidante, qu’est la poliomyélite, coûte 10 fois plus chère que sa prévention. Et ont fait le leur cet adage qui avertit : ‘‘Vaut mieux prévenir que guérir’’. Cette campagne qui cadre parfaitement avec la stratégie nationale visant à atteindre les Objectifs de développement durable (ODD), s’inscrit aussi dans la droite ligne de la mise en œuvre du GIV (global initiative of vaccine), une initiative qui a permis de démontrer que la vaccination constitue un maillon central dans la résolution des problèmes de santé et l’amélioration du quotidien des populations. Ainsi, et selon le Ministère en charge de la Santé, « les leçons apprises et les acquis de ces initiatives vaccinales appellent à un plaidoyer et une mobilisation plus importante des fonds afin de mieux soutenir les services de vaccination par la disponibilité des vaccins, garantissant de ce fait un meilleur contrôle de l’élimination et de l’éradication de certaines maladies ».
Par Mahamadou Diallo, Envoyé spécial (onep)
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La campagne nationale de vaccination qui s’est déroulée, du 13 au 16 juin dernier, avec un ratissage lors des journées du 17 au 18 juin. A Diffa, comme un peu partout sur l’étendue du territoire, cette campagne a vu la mobilisation de plusieurs acteurs pour son effectivité et sa réussite. Ces divers et multiples acteurs, chacun en ce qui le concerne s’est pleinement impliqués, à Diffa. Certains d’entre-deux témoignent :
Nafissa Karimou, une vaccinatrice au quartier Château de Diffa.
« Nous faisons de porte en porte, pour nous faire présenter les enfants de 0 à 5 ans, successibles d’être vaccinés et de bénéficier de la vitamine A, qui favorise une bonne croissance et leur évite la cécité nocturne et de l’Albendazole, qui protègent ces enfants des vers intestinaux. Comme à l’accoutumée, en nous introduisant dans une concession, nous saluons les occupants, nous nous présentons aux responsables des foyers et nous procédons à la vaccination, une fois que l’enfant ou les enfants nous ont été présentés. En général, tout se passe bien et nous prenons congé de nos hôtes, après avoir procédé à l’identification et au marquage (sur la porte principale)des ménages ».
Mme Falmata Mamadou, une réfugiée nigériane de 42 ans, originaire du village de Malam Fatori.
« Je suis contente que mes trois enfants soient vaccinés contre la polio. Chez nous, à MalamFatori, nos enfants recevaient des vaccins contre la polio et nous allons toujours continuer à les faire vacciner surtout que là-bas, leur papa était agent de vaccination ».
Fatima Cheffou, au niveau du CSI de Diffa, confie avoir trois enfants. « Saidou est âgé de 4 ans. Il vient d’être vacciné, ce matin, contre la polio, cette maladie qui rend les enfants infirmes et qui les empêche de se mouvoir normalement ». Elle ajoute que « les vaccinations régulières de l’enfant permettent d’éviter la polio ». «Cette fois-ci, en dehors du vaccin contre la polio, mon enfant a aussi reçu de la vitamine A et de l’Abdenbazole. Mes enfants n’a jamais raté la vaccination. J’en appelle aux parents et surtout aux femmes pourqu’elles face faire vacciner leurs enfants », lance-t-elle.
Maïgari,le chef du quartier administratif, fait le bilan, avec les vaccinateurs et le superviseur, après la première journée de vaccination du 13 juin : « En tout, ils ont coché 171, donc ils ont vacciné 171 enfants. Il reste encore quelques enfants à vacciner d’ici le 18 juin. Car il y a 197 enfants qui sont ciblés», constate Maigari. Il lance, par la suite, cet appel aux populations de son quartier en particulier et celles de tout Diffa, en général, celui d’« ouvrir grandement leurs portes aux agents de vaccination ».
Awal Sidi de la Radio communautaire Mounio FM de Kabléwa.
«Dans nos émissions, nous réservons une bonne partie à des programmes de sensibilisation en langue locale. A chaque campagne nous passons de longues heures à lancer des messages en faveur de la vaccination contre la polio, nous proposons aussi des programmes relatifs aux conséquences néfastes de la polio avec des témoignages de personnes ayant été victimes de cette terrible maladie et ceux des agents de santé du Centre de Santé Intégré (CSI) de Kabléwa et des environs ainsi que ceux du district sanitaire de Diffa. Nos messages portent car beaucoup de nos auditeurs reconnaissent que c’est grâce à nos émissions qu’ils se convainquent de faire vacciner leurs enfants. Nous en sommes fiers »,
Elhadj Abba Oumara, Relais communautaire frontalier de Kolomanga (Kabléwa).
«Lorsqu’il y a une campagne de vaccination en préparation, nous prenons contact avec le Maïgari, à qui nous expliquons de quoi il s’agit et il nous donne l’autorisation de parcourir le village pour l’annoncer à tous les habitants ainsi que le jour des passages des équipes de vaccinateurs. Je fais environs 4 jours pour parcourir une quarantaine de km, à cheval, pour toucher l’essentiel des villages frontaliers et les camps de réfugiés nigérians. Nous faisons plusieurs passages pour voir les enfants car les parents sont souvent absents. Dieu merci, avec cette sensibilisation, beaucoup de parents, qui au départ étaient réticents, présentent leurs enfants aux vaccinateurs et profitent ainsi pour leur assurer une meilleure santé. C’est cela ma satisfaction et ma fierté ». Hama Sayadi Laouali, Chef CSI Kablewa.
«Comme à Bosso, avec laquelle nous faisons frontière, un cas de polio a été détecté et il y a ici à Kabléwa des déplacés de cette localité. Nous avons donc décidé de prendre le taureau par les cornes. Ainsi, une semaine avant cette campagne de vaccination, nous nous sommes mobilisés avec les leaders communautaires, les Chefs des villages, les relais communautaires, les femmes leaders, brefs tous les acteurs liés à la santé de nos communautés. C’est en ce temps que commence la mobilisation qui se répercute au niveau de chaque village du CSI de Kabéwa. C’est donc ainsi qu’au jour J, les parents et les enfants se tiennent près à accueillir les équipes de vaccinateurs. Et tout le monde s’est mobilisé pour une réussite effective de cette campagne de vaccination. Le mieux, je pense, c’est de sauver nos enfants et leur assurer un meilleur avenir, c’est aussi cela notre devoir de parents. Une personne infirme peut mettre toute une famille à genoux, c’est ce qu’il faut retenir et évite »,
Elh. Warouma Arifa, Chef de canton de Goudoumaria.
« Depuis longtemps nous entendons parler de la poliomyélite et de ses conséquences désastreuses sur les enfants. Nous en avions vu des cas, dans nos localités, cela fait pitié et cela est révoltant. Surtout quand on sait qu’en injectant juste quelques gouttes du vaccin, on peut sauver à vie nos enfants. C’est cela qui a fait que je me suis personnellement engagé dans ce combat, pour booter cette maladie hors de notre territoire. Mieux, je sensibilise mes concitoyens pour qu’ils fassent vaccinés leurs enfants. En leur disant qu’un seul cas de polio constitue une épidémie ».
Malam Aboubacar Abdoulahi, 44 ans, prêcheur à la grande mosquée du quartier Dubaï de Diffa
« Je pense et je suis convaincu que nous, les leaders religieux, nous avons un grand rôle à jouer dans le cadre des actions en faveur d’une meilleure santé de nos populations. Je suis d’accord et je soutien les différentes campagnes qui visent à protéger nos enfants non seulement contre la poliomyélite mais aussi contre toute maladie qui peut entraver leur épanouissement et leur développement. Ce soutien n’est pas qu’intentionel car chaque fois que l’occasion se présente ou quand une campagne de vaccination est en vue, j’en fais le point central de mes prêches, tout en invitant les fidèles à faire vacciner leurs enfants, dans leur intérêt et dans celui de toute la communauté. Par la grâce de Dieu, nos appels sont entendus. En effet, les services qui se chargent de ces campagnes nous le font savoir, nous félicitent et surtout nous associent dans ces actions de sensibilisation et de mobilisation ».
Le Directeur régional adjoint de la Santé publique de Diffa, M. Mamadou Elhadj Ibrahim.
« Le démarrage de la campagne contre la polio couplée à la distribution de la vitamine A et de l’Albendazole est effectif dans la région de Diffa. Nous avons pu confirmer que tous les 6 districts de la région sont à pied d’œuvre dans la campagne.
Plaise à Allah, nous nous sommes mobilisés, nous avons déployés tous les moyens nécessaires pour atteindre notre cible. D’ailleurs nous irons au-delà de nos cibles, car il faudra tenir compte des déplacés et des réfugiés
Lors de cette campagne pour ce qui est de la lutte contre la polio (VPO), il y a 288.576 enfants de 0 à 5 ans à vacciner, et pour ce qui est de la vitamine A, la cible est de 248.000 enfants. Pour l’Albendazole, ce sont 286.000 enfants qui sont ciblés durant cette campagne ».
Des dispositions sécuritaires ont été prises en collaboration avec les autorités administratives. Nous avons aussi l’appui des autorités coutumières qui nous accompagnent. Pour la première journée, nous n’avons pas enregistré de cas de refus. Ainsi, nous avons enregistré une campagne de vaccination positive, un résultat à mettre à l’actif de l’opération de sensibilisation et de la forte mobilisation de tous les acteurs »,
Propos recueillis par Mahamadou Diallo(onep)
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« Si je n’avais pas été victime de la polio, j’aurais été à l’école (…), je me serais même engagé dans l’armée et aurais, certainement, été parmi ceux qui combattent les terroristes qui harcèlent notre pays », indique Lawan Boucar
Lawan Boucar est natif de Diffa, âgé de 40 ans, il a marié et père d’un enfant. Il a perdu l’usage de ses membres inférieurs suite à une attaque du virus de la poliomyélite, alors qu’il avait 8 ans, selon lui. C’est donc 32 ans d’infirmité de souffrance que M. Boucar a enduré. Même s’il dit ne se rappeler, en détails, des circonstances de sa maladie, il reconnaît que la poliomyélite est une maladie invalidante, qui engendre mépris, discrimination et répulsion. En dépit de son handicap Lawan Boucar s’est efforcé d’apprendre un métier. Celui de confectionneur de lit, de chaise et de table avec du fil plastique. Métier qui, selon lui, lui permet de subvenir aux besoins de sa famille et même d’aider d’autres personnes, plutôt que de mendier, comme le font certains qui sont handicapés ou non.
‘‘Si je n’avais pas été victime de la polio, j’aurais été à l’école comme les enfants de mon âge à l’époque, j’aurais aussi fait plusieurs activités commetravailler dans les champs de poivron, faire du petit commerce. Je me serais même engagé dans l’armée et serais, certainement, parmi ceux qui combattent les terroristes qui harcèlent notre pays. Bref, j’aurais été plus actif, plus productif et moins discriminé que je le suis actuellement avec mon handicap’’, témoigne-t-il tristement.
Il estime qu’un enfant atteint de la polio n’est considéré ni dans famille, encore moins par ses amis et même par sa communauté. « A longueur de journée, nous subissons la récrimination, la stigmatisation, la discrimination. Souvent, c’est même nos enfants et nos femmes qui nous réprimandent et nous condamnent, comme si nous avons fait sciemment pour être malades et infirmes. C’est vraiment dure, difficile et insupportable d’être infirme et victime de la polio », soupire Boucar, essuyant, au passage, une larme qui envahit ses yeux.
Se reprenant, il continue que c’est cette humiliante et déshumanisante situation doit cessez. ‘‘L’une des meilleures façon d’y mettre fin est la prévention de cette maladie à travers la vaccination’’, estime Lawan Boucar.
‘‘Je saisis l’occasion pour remercier et encourager l’Etat et ses partenaires, tel que l’UNICEF, qui interviennent dans le cadre de ces campagnes de vaccination, en particulier, et dans la prise en charge sanitaire et la protection des droits de nos enfants en général’’, conclu Lawan Boucar.
Mahamadou Diallo(onep)
12 juillet 2019
Source : http://www.lesahel.org/