A l’allure où va la campagne électorale, Mahamane Ousmane est sûrement parti pour remporter, haut la main, le second tour de l’élection présidentielle. Bazoum Mohamed, habité par un profond doute depuis la proclamation des résultats définitifs par la Cour constitutionnelle, a déjà pris le pouls de la population. A Tillabéry, d’abord où on le dit déçu de l’apport de Seïni Oumarou dont c’est le fief, puis à Dosso, hier, le poulain de Mahamadou Issoufou a eu toute la latitude d’apprécier son immense impopularité. Dans l’arène de lutte Salma Dan Rani, désespérément clairsemée pour ne pas dire vide, il a parlé de son programme et de ses intentions. Seulement, les Dossolais, eux, étaient ailleurs. Leur intention de voter massivement Mahamane Ousmane, ils l’ont matérialisée en boycottant Bazoum Mohamed et sa délégation. Un boycott qui dû faire son effet sur le mental de Bazoum Mohamed. S’il a tenu, malgré les tribunes vides, à faire son speech, il a sans doute accusé le coup. A tiilabéry, déjà, mais surtout à Dosso, il a pris la mesure de l’aventure ambiguë dans laquelle il s’est embarqué.

Une impopularité fondée, à la fois, sur le personnage que l’on dit arrogant et plein de mépris pour les autres, et la gouvernance scabreuse qu’il revendique et dont il veut assurer la continuité s’il est élu.

Contesté dès le départ, d’abord au sein du Pnds Tarayya où il a réussi à s’imposer en se faisant adouber par le Président Issoufou Mahamadou, puis au niveau national où ses pièces d’étatcivil ont été jugées frauduleuses, Bazoum Mohamed est en train, au cours de cette campagne pour le second tour, d’apprécier, à sa juste mesure, son impopularité.

Une impopularité fondée, à la fois, sur le personnage que l’on dit arrogant et plein de mépris pour les autres, et la gouvernance scabreuse qu’il revendique et dont il veut assurer la continuité s’il est élu. Les Nigériens qui veulent du changement sont incontestablement les plus nombreux. Si Seïni Oumarou et Albadé Abouba ont décidé de soutenir Bazoum Mohamed, ils n’ont fait vraisemblablement que de pousser vers Mahamane Ousmane tous ces militants qui, pour des raisons qui leur sont propres et qui n’échappent nullement à ces deux leaders politiques, ont pris la résolution de voter pour le candidat qui incarne le changement. La rupture, à bien des égards, est nette entre les leaders du Mnsd et du Mpr et nombreux de leurs militants. Et ce ne sont pas certainement le discours incohérent et à la limite insultant pour la dignité humaine de Seïni Oumarou à Tillabéry qui y changera quelque chose.

« Le Niger n’est pas à vendre, notre pays n’est pas à vendre »

Mahamane Ousmane, dans cette histoire qui se construit, n’aura que se rabaisser pour ramasser les fruits mûrs tombés. Il l’a fort bien compris et intégré dans sa campagne. À Tillabéry, il a su parler juste aux populations et cela a visiblement fait mouche. Face à des populations durement éprouvées par l’insécurité et habitées par un profond doute sur l’engagement des gouvernants actuels à combattre sans faiblesse le terrorisme, Mahamane Ousmane a fredonné une petite chansonnette en langue zarma : « Le Niger n’est pas à vendre, notre pays n’est pas à vendre », a-t-il fredonné, à la grande satisfaction du public, immense venu l’écouter. Ce petit mot placé lors du lancement de sa campagne a fait déjà gagner à Mahamane une longueur d’avance face à son challenger qui s’est empêtré dans des discours vagues et sans aucune pertinence au regard de ce qui a prévalu durant 10 ans et qu’il promet de continuer.

Bazoum, visiblement, sait que les carottes sont cuites et se livre à un baroud d’honneur

Mahamane Ousmane, parti pour gagner, haut la main ? Il n’y a pas de doute et Tillabéry et Dosso en ont donné le signal. À Zinder, à Maradi, à Agadez, à Tahoua, à Diffa et à Niamey probablement, les populations nigériennes ne feront sans doute pas comme Seïni Oumarou qui s’est démené à faire recaler Bazoum Mohamed devant la Cour constitutionnelle en contestant la validité et la régularité d’obtention de ses pièces d’état-civil.

Les échos qui viennent des quatre coins du Niger tendent à croire que Bazoum se livre à un baroud d’honneur et que les Nigériens ont déjà choisi leur président. Le 21 février, sauf un cataclysme électoral, Mahamane Ousmane retrouvera, pour une seconde fois, le fauteuil présidentiel. Après l’avoir perdu, 25 ans plus tôt à la suite d’un coup d’Etat militaire.

Yaou